Si l’évocation du terroir de Marie-Galante ne suffisait pas, alors la suggestion d’un rhum vieux de la maison Bielle devrait vous convaincre de rencontrer la cuvée anniversaire de la Compagnie duRhum. L’année 2008 aura été prodigieuse puisqu’elle nous offre cette fois, un fût unique d’ancien bourbon sélectionné pour l’occasion.
D’abord farouche, malgré la délicatesse de la jambe, du haut de ses quelques 54 degrés, l’esprit ne se laissera pas approcher sans précautions. Les esters l’emportent sur les épices et les notes de bois poussiéreux, sans parvenir à masquer la promesse du délice qui vient, sur les hauteurs de l’arrière-nez.
Ce sera un rhum pour les patients, pour les paisibles aventuriers qui sauront profiter de la fin du jour pour aérer le verre et donner au rhum l’opportunité de se dévoiler. De longues minutes plus tard, le bouquet se livre tandis qu’un léger dépôt se forme. Les dix années de vieillissement se font sentir, à moins que ce ne soit la douceur de Novembre qui s’annonce.
Le profil s’affine et des touches de miel, de musc blanc et de fleur d’oranger apparaissent, tissées dans un bouquet qui reste chaleureux. Attaque franche en bouche, l’alcool est présent sur un corps asséchant ,comme une tige poussée à même le calcaire brut… Agrumes en puissance (écorces d’orange) épices sucrées, puis retour au miel matiné d’une amertume d’amande et les tanins délicats du bois se posent sur la langue pour une ultime explosion. La finale est longue comme un coucher de soleil, dans l’attente languide du rayon vert.
Je perçois une finition sur le tabac blond et frais dans le verre vidé de sa dernière goutte et je souris avec une indolente certitude. Au creux des alliances d’agrumes confits et de cannelle, muscade (et girofle même !) si caractéristiques de la maison, c’est la persistance d’une note florale inespérée, qui aura retenu le nez et le coeur de Philippe. Un peu comme un bouquet sauvage de la flore de campêche, offert par un maître de l’ikebana.